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Le Micalvi

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Le port le plus austral du monde

Superbes nuages effilés surplombent les pics des DientesLe vent a soufflé fort entre la caleta Juana et Puerto Williams.

La météo annonçait 10 nœuds, nous filons sous tourmentin par 50 nœuds.

A l’approche de l’île Navarino cela se calme un peu.

Le ciel rosit, de superbes nuages effilés surplombent les pics des Dientes.

Du Rhin à la Terre de Feu

Morgane s’engage doucement dans la rivière. Le Micalvi apparaît, masse sombre et rouillée pourtant si accueillante pour les marins du grand Sud.

Micalvi

Le vaillant navire commença sa carrière comme bâtiment de commerce sur le Rhin.

Pendant la première guerre mondiale la puissante Allemagne l’envoya livrer armes et munitions au Chili, jeune république prometteuse.

Il entame alors une nouvelle vie, toute dédiée au service des canaux de Terre de Feu et de Patagonie.

Le Micalvi parcourt sans relâche les fiords sauvages et froids, le Golfe de Peñas, violent et meurtrier, et les derniers refuges des indiens presque décimés.

La lourde coque d’acier riveté est bien adaptée aux rudesses du climat fuégien. Le Micalvi ravitaille les groupes isolés, surveille pêcheurs et chasseurs, transporte les troupes et offre les services du médecin du bord.

Le bateau devient mythe. Il est lien et présence. Il est indispensable aux habitants de ces îles austères balayées par le vent.

Le Micalvi voit avec tristesse la décadence puis la disparition des derniers indiens Kaweskars.

Réduits à l’état de mendiants de la mer, rongés par l´alcoolisme et les maladies, ils sont recueillis par le navire et conduits vers leur dernier campement : Puerto Eden.

A la fin des années cinquante, après tant de services rendus et de missions menées à bien, le bateau prend sa retraite.

L’envoyer à la casse ? Le couler ? L’oublier définitivement ? Les gens de mer sont superstitieux : une telle solution ne manquerait pas de porter malheur.

Le Micalvi sera échoué et deviendra le port le plus austral du monde ! La nouvelle petite cité de Puerto Williams manque d´infrastructures, le Micalvi remplira parfaitement ce nouveau rôle !

Dans la timonerie naît bientôt un bar au zinc convivial et accueillant. D’abord peuplé de militaires, ils doivent bientôt laisser la place à des arrivants d’un autre acabit : les gitans voileux du sud.

Un bar légendaire

Murs couverts de fanions et d’héroïques photographiesPlutôt français, grands buveurs et forts en gueule, les aventuriers s’approprient ces murs couverts de fanions et d’héroïques photographies.

A les écouter aujourd´hui on sent pourtant bien que le Micalvi, c´était mieux avant.

Avant que les bateaux de croisière ne vomissent leurs centaines de passagers ;

avant le boom du charter à la voile sur le Cap Horn et l’Antarctique ; avant que Patty, bringueuse infatigable, ne laisse à d’autres le soin de servir les assoiffés.

Mais certains soirs le vieux bateau se remplit encore et l’ambiance vaut le détour.

Les équipages qui rentrent d’Antarctique racontent avec force détails leur passage du Drake, un ardéchois allumé commente sa nuit sur la plage alors que le vent les empêchait de rentrer à bord, un Christophe Auguin goguenard supervise le tout en rigolant.

Marion Labatut © Azurever.com