Si vous voulez comprendre la situation des Aborigènes d’Australie, essayez d’imaginer que demain, des extra-terrestres viennent visiter la terre et qu’ils soient beaucoup plus évolués que nous.
Imaginez qu’ils prennent possession de notre planète, nous poussant à adopter leur religion, leur langue et leur manière de vivre.
C’est la meilleure comparaison pour comprendre ce qui arriva aux Aborigènes d’Australie, il y a un peu plus de deux cent ans, lorsque les « Blancs » colonisèrent le continent.
Ce fut un choc des cultures dont ne s’est toujours pas remise l’Australie. Les Aborigènes parlent de cette période avec le terme d’invasion.
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Lorsque les Européens arrivèrent en Australie, à la fin du XVIIIème siècle, ils trouvèrent une vaste contrée inhospitalière et habitée par des humains semblant surgis de la préhistoire.
Aucune ville, aucune trace d’agriculture, seulement des bandes de nomades portant des armes de pierre et de bois.
D’ailleurs, les Anglais déclarèrent l’île « Terra nullius », la terre qui n’appartient à personne.
Toute la culture Aborigène est basée sur la spiritualité, qui couvre tous les aspects de la vie.
On peut dire que si les Aborigènes, depuis leur arrivée en Australie il y a 70 000 ans, n’ont pas réalisé de progrès technologiques, c’est sur le plan de la spiritualité qu’a eue lieu leur évolution.
Incompréhensible pour des Européens en pleine révolution industrielle ! Ainsi, aucun traité n’a jamais été signé avec les Aborigènes, puisque aucun droit de propriété ne leur était reconnu.
Après quelques années de contact pétri de curiosité réciproque, la situation s’envenima. Les colons s’approprièrent les terres et ainsi les territoires de chasse et de cueillette traditionnels.
Ils importèrent du bétail et construisirent des villes. Les Aborigènes furent alors considérés comme nuisibles, et souvent abattus, car ils s’attaquaient souvent au bétail.
Le dernier massacre « officiel » eut lieu en 1928, près d’Alice Springs.
Au vingtième siècle, on pratiqua en Australie une politique dite d’assimilation, ayant pour but d’intégrer les Aborigènes à la société blanche.
Les nomades étaient sédentarisés de force autour de missions, les enfants métis retirés à leurs familles et placés dans des institutions blanches.
Ce n’est qu’en 1967 qu’un référendum accorda le statut de citoyen australien aux Aborigènes !
En 1988, Eddie Mabo, un indigène du détroit de Torres, engagea un long procès avec le gouvernement pour exiger l’abandon du concept de Terra nullius.
Il en résulta le Native Title Act, en 1992 qui permit aux Aborigènes de revendiquer des droits sur leurs terres traditionnelles.
Aujourd’hui, le visiteur en Australie ne voit bien souvent que deux aspects de la réalité Aborigène : d’un côté la culture célébrée par les arts (mais rappelons que ce sont les Blancs qui ont poussé les Aborigènes à peindre sur toile !) et le tourisme culturel souvent organisé par les clans eux-mêmes et d’un autre côté la misère violente des Aborigènes dans la rue.
Bien sûr, entre ces extrêmes se trouvent des situations très diverses, mais le fait est que l’espérance de vie moyenne d’un Aborigène en Australie est de 20 ans inférieure à celle d’un non-indigène et que les taux de mortalité pour cause d’obésité, d’alcoolisme ou de suicide sont alarmants.
Dans bien des cas, une culture complexe, vieille de plus de 40 000 ans, meurt avec les derniers détenteurs du savoir, les Anciens dont les enfants alcooliques sont incapables de reprendre le flambeau.
Autre problème : le racisme encore endémique dans de nombreuses régions d’Australie et qui ronge depuis des dizaines d’années la confiance en eux des Aborigènes.
L’essor du tourisme international a permis de raviver la flamme de la culture Aborigène : si des touristes font des milliers de kilomètres pour s’intéresser à leur culture, disent beaucoup d’Aborigènes, c’est que celle-ci mérite d’être conservée.
Dans un pays où pendant deux cent ans, les Aborigènes étaient considérées comme des êtres inférieurs, la fierté d’être un « blackfella » connaît aujourd’hui une renaissance encore timide mais bien présente.
Il reste beaucoup à faire. Comme le dit le chanteur Aborigène Archie Roach dans l’une de ses chansons « Ce dont nous avons besoin, c’est de temps », le temps de trouver sa place entre deux mondes que tout oppose.
Quelques conseils de savoir-vivre Aborigène
Ne photographiez jamais les Aborigènes sans autorisation !
Choisissez avec soin le tour-opérateur proposant des circuits de « culture Aborigène » : préférez toujours ceux gérés par les Aborigènes eux-mêmes.
Soyez courtois et respectueux, surtout envers les personnes âgées.
Evitez de poser trop de questions, car chez les Aborigènes, on apprend en regardant et en écoutant.
Ne vous étonnez pas de l’absence de contact visuel : regarder quelqu’un dans les yeux ne se fait pas, sauf pour le provoquer !
Les mots de « blackfellas » et « whitefellas » pour désigner respectivement les Aborigènes et les Blancs sont très utilisés et politiquement correctes.
Les Aborigènes n’ont pas du tout la même notion du temps que nous, leurs temps est cyclique alors que le notre est linéaire : si vous donnez un rendez-vous à un Aborigène, il peut très bien ne pas venir, ne vous en offusquez pas ! Il sera peut-être là demain !
Enfin, si un Aborigène vous appelle « sister » ou « brother » (ma soeur/mon frère), prenez cela comme un compliment !
Informations pratiques
Documentation anthropologique sur les Aborigènes (une partie du site en français)
Dictionnaire virtuel sur les Aborigènes, très complet, en anglais
V.M. Schoelzke © Azureva.com