Difficile de ne pas l’avoir en tête – pour ne pas dire en bouche –, l’image rêvée d’un verre de rosé siroté « glace » en bord de mer… Et pourtant, les amateurs de bons vins le savent bien, il serait fort réducteur de résumer les vins de Provence à la production de rosés. Certes, ils dessinent presque à eux seuls, avec la lavande et l’huile d’olive sans doute, l’image de marque du territoire, mais vous serez surpris par la finesse des arômes des nectars blancs et rouges, que ce soit en Côtes de Provence, en Côteaux Varois en Provence, en Côteaux d’Aix-en-Provence, ou même en Bandol. Epicuriens, c’est par ici : coup de projecteur sur les plus belles escales oenotouristiques de Provence !
Rapide point géographique avant de démarrer votre Route des Vins : si le territoire de Provence, relativement vaste, regroupe les Alpes de Haute-Provence, le Vaucluse, les Alpes Maritimes, le Var et les Bouches-du-Rhône, le terroir viticole des Vins de Provence se trouve quant à lui concentré exclusivement au sud, sur ces deux derniers départements et sur une petite partie des Alpes-Maritimes. Le vignoble provençal, gorgé de soleil, s’étend ainsi sur quelque 200 km entre mer et montagne, offrant au passage de véritables opportunités de découvertes hédonistes. Quant aux Bandol, s’ils n’entrent pas dans la catégorie officielle des Vins de Provence, nous profiterons de la proximité de leur terroir pour vous faire partager quelques pépites, dégustées et approuvées !
La reine Côtes de Provence
Débutons avec le plus vaste vignoble, celui des Côtes de Provence, étendu sur plus de 20 000 hectares et pas moins de 84 communes. Aussi riche, dit-on, dans ses vignes qu’au niveau de ses racines, l’appellation s’enorgueillit d’une une multitude de terroirs telle, que cinq dénominations géographiques complémentaires sont nées depuis sa reconnaissance officielle en 1977 : Côtes de Provence Sainte-Victoire, Côtes de Provence Fréjus, Côtes de Provence La Londe, Côtes de Provence Pierrefeu et Côtes de Provence Notre-Dame des Anges – la toute dernière, sortie de terre en 2019 ! Pour vous, œnotouristes, c’est donc une véritable aubaine pour parcourir la diversité des paysages que compose son territoire, et pour déguster les nuances de chaque sous-appellation lors de haltes dans les caveaux des domaines. Plus intéressant encore, pour les plus pointus peut-être : la variété de cépages admis en Côtes-de-Provence est telle elle aussi que chaque dégustation, même au sein d’une même sous-appellation, se révèlera être une expérience à part ! Cinsault, Grenache, Mourvèdre, Syrah et Tibouren pour les rouges et rosés (plus Cabernet Sauvignon et Carignan en cépages secondaires) ; Clairette, Rolle, Sémillon et Ugni blanc pour les blancs : chaque domaine, chaque château, chaque coopérative assemble au gré de son savoir-faire, de ses goûts et de son expérience, pour donner naissance à des vins véritablement uniques. Quant aux nectars issus d’assemblages hors cahier des charges, où à ceux dont le terroir n’est pas classé, ils intègrent la catégorie des Indication Géographique Protégée, et dévoilent souvent eux aussi de bien belles surprises… Allez, on passe à la dégustation ? Voici quelques coups de cœur à découvrir en caveau pour profiter en plus de la beauté du domaine et d’un accueil aux petits oignons !
- En Côtes de Provence: le Château de l’Aumérade à Pierrefeu-du-Var (83), en particulier sa cuvée « Sully » blanc (une pépite !) ; le Château Saint-Roux au Cannet-des-Maures (83), pour ses vins bien sûr, mais aussi pour ses belles infrastructures ; le Clos Cibonne au Pradet (83) pour sa cuvée « Tibouren » en rouge et rosé ; les prestigieux Châteaux Minuty, Barbeyrolles et le Domaine La Rouillère à Gassin (83), sur la presqu’île de Saint-Tropez.
- En Côte de Provence Sainte-Victoire: le Cellier Marius Caïus à Pourrières (83), pour sa cuvée « 1912 » dans les trois couleurs, et pour sa cuvée « Terres d’Histoires » en IGP Var ; le Château de la Bégude à Rousset (13) pour ses vins rouges issus de vieilles vignes, dont la plus vieille date de 1954.
- En Côtes de Provence Fréjus : Le Clos des Roses à Fréjus (83), pour son excellent rouge, mais aussi pour son IGP Maures « Mademoiselle Rose » en rouge et rosé.
- En Côtes de Provence La Londe : trois valeurs sûres avec le Château Sainte-Marguerite (superbe cru classé, bio qui plus est), le Château Hermitage Saint-Martin (incroyable cuvée Ikon dans les trois couleurs), et le Château Pas du Cerf (remarquable cuvée « Pas du Cerf » rouge) à La Londe-les-Maures : leurs vins sont extra !
- En Côtes de Provence Pierrefeu : le Château La Gordonne à Pierrefeu-du-Var (83), prisé pour ses rosés, rouvrira au printemps avec un accueil dédié à l’œnotourisme.
- En Côtes de Provence Notre-Dame-des-Anges : le Château Demonpère au Luc-en-Provence (83), pour sa cuvée Prestige dans les trois couleurs et sa cuvée Notre-Dame des Anges rosé ; outre ses vins bio régulièrement primés, vous pourrez y acheter de la bonne huile d’olives, bio toujours !
Les plus méconnus Côteaux Varois en Provence
Etendue sur 2633 hectares de vignoble en Provence Verte, ou Provence « calcaire » pour les spécialistes, l’appellation Côteaux Varois en Provence réunit vingt-huit communes mais ne jouit pas de la même notoriété que sa grande sœur. Et pourtant. Marqué par des reliefs plus francs, culminant jusqu’à 1 000 mètres d’altitude pour le massif de la Sainte-Baume, le terroir profite d’un climat continental. Les automnes et les printemps souvent très doux alternent avec des étés parfois torrides, et des hivers plus rigoureux dans le reste de la région. L’occasion pour vous de prendre de la hauteur et de découvrir le haut plateau varois, où les principaux cours d’eau du département prennent d’ailleurs leur source. Profitez donc de votre escapade pour faire un tour du côté du Vallon Sourn entre Châteauvert et Correns, des chutes du Grand Baou au Val, du Vallon des Carmes à Barjols, ou encore pour une promenade bucolique le long des sources de l’Huveaune à Nans-les-Pins.
Retour à la dégustation dans l’un des caveaux que vous aurez choisi – pourquoi pas l’une de nos recommandations ci-dessous : les vins rouges, composés essentiellement de Cinsault, Grenache, Mourvèdre et Syrah, dévoilent des arômes de fruits noirs, d’épices voire parfois de cuir (bon potentiel de garde au passage), tandis que les blancs combinent des arômes de fruits et de fleurs blanches, et que les rosés associent agrumes, fruits à chair blanches, fruits à chair jaune, fruits exotiques et fruits rouges frais. Feu d’artifice sensoriel en somme ! Parmi nos recommandations en Côteaux Varois en Provence : le Domaine Fontainebleau au Val, où vous pourrez, après une belle dégustation découvrir le vignoble en calèche ; le Domaine des Roseaux à Barjols, qui produits de très bons nectars en rouges, ainsi que des huiles d’olives bio ; ou encore le Domaine la Rose des Vents à La Roquebrussanne, notamment pour sa cuvée Seigneur de Broussan dans les trois couleurs.
Les Côteaux d’Aix-en-Provence en Bouches-du-Rhône
C’est le terroir le plus occidental du territoire des vins de Provence. L’aire d’appellation s’étend de la Durance à la Méditerranée, et de la vallée du Rhône à l’ouest jusqu’à la montagne Sainte-Victoire à l’est. L’activité viticole quant à elle, se concentre entre une succession de chaînons parallèles au littoral allant de la chaîne de la Nerthe aux Alpilles ; grosso modo, elle forme un trapèze entre les communes de Salon-de-Provence (13), Martigues (13), Marignane (13) et Rians (83). Elle rassemble 65 caves particulières et 12 coopératives, pour un total de 4127 hectares de vignoble, produisant de l’ordre de 213 000 hectolitres annuels dans les trois couleurs. Les sols variés, tantôt argilo-calcaires, tantôt sableux, tantôt encore caillouteux, alliés à un climat méditerranéen marqué par une forte présence du Mistral (pour un bel ensoleillement et peu de pluies), confèrent aux vins un beau relief aromatique.
Voilà pour la théorie ! Pour la pratique, afin de coupler le plaisir du goût avec celui des yeux, direction de Château Beaulieu à Rognes (13) : son vignoble, vieux de 2 000 ans, se trouve lové dans le cratère de l’unique volcan de Provence ; l’édifice quant à lui, a été bâti en 1576 par Henri III ! Tout proche, le très beau Château de Cavalon à Lambesc (13), le plus ancien domaine viticole de la commune exploité depuis l’époque des princes d’Orange, mérite lui aussi le détour. Au Château Calissanne à Lançon-de-Provence, on vous contera certainement la légende selon laquelle les fameux Calissons d’Aix seraient originaires d’ici ; très beau domaine par ailleurs.
Bandol, rockstar du rosé… mais pas que !
Last but not least, les vins de Bandol ! Concentrée à l’ouest du littoral varois, sur huit communes seulement (Bandol, Le Beausset, Le Castellet, La Cadière d’Azur, Saint Cyr-sur-mer, Sainte-Anne d’Evenos, Sanary-sur-mer et Ollioules), l’aire d’appellation ne s’étend « que » sur 1560 hectares. Abrité par le massif de la Sainte Baume, qui culmine au nord à 1147 mètres d’altitude, le vignoble offre aux visiteurs un superbe panorama en restanques plongeant délicatement jusqu’à la Méditerranée.
Si le rosé tient une place de maître dans l’imaginaire collectif, à juste titre d’ailleurs, profitons de ce reportage pour découvrir les rouges de l’appellation, qui méritent amplement que l’on s’y attarde ! Représentant environ 30% de la production, contre 7 à 12% pour les précédentes appellations des Vins de Provence, il est souvent considéré comme l’un des meilleurs vins rouges de Provence. La recette de son succès ? Un microclimat très favorable au cépage mourvèdre, le roi de l’appellation, offrant des vins puissants, charpentés et de très longue garde. Le plus : les domaines classés en Bandol sont souvent très attachés aux méthodes de viticulture et de vinification « à l’ancienne », beaucoup pratiquent encore les vendanges à la main, et un certain nombre sont certifiés bio.
Aller, nos coups de cœur pour terminer sur une bonne dégustation : le domaine Ray Jane au Castellet (83), vignerons de père en fils depuis 1288, qui cultive ses 28 hectares bio dans la plus pure tradition avec labour à la charrue et piochage à la main ; les domaines Bunan à La Cadière-d’Azur (83) – Moulin des Costes et Château La Rouvière –, amoureux de la terre depuis trois générations et cultivant eux aussi en bio ; ou encore le domaine de la Tour du Bon au Castellet (83), qui produit d’ailleurs essentiellement en rouge, et où vous pourrez séjourner.
Roxane, 50% hédoniste, 50% épicurienne… On vous laisse chercher la nuance !